Le budget wallon va faire des dégâts afin de respecter la trajectoire budgétaire (retour à l’équilibre dans les cinq ans). Mais jusqu’à quelle hauteur ?

« Le Soir », Stéphane Vande Velde, 7 octobre 2024
Ce lundi, le gouvernement wallon va rentrer dans le dur en se lançant dans son conclave budgétaire. Alors que la Fédération Wallonie-Bruxelles a débuté le sien avec quelques jours d’avance – on le dit moins compliqué à boucler car c’est la Région wallonne qui portera une partie de l’effort – c’est au tour de la coalition azur namuroise de boucler son premier exercice budgétaire. L’exercice ne sera pas simple. Parce qu’il s’agit des premiers arbitrages au sein du nouveau gouvernement entre Engagés et MR. Ensuite parce que la trajectoire budgétaire décrétée dans la déclaration de politique régionale (DPR) ne laisse pas de marges de manœuvre : il va falloir se serrer la ceinture. Aucun chiffre n’est encore sorti, même si Adrien Dolimont a rappelé à plusieurs reprises que les tableaux budgétaires étaient bien prêts mais devaient encore être débattus. Mais avec un déficit de 2,6 milliards en solde sec – déficit que la trajectoire prévoit de combler dans les cinq ans –, et surtout 1,5 milliard d’amortissement de dettes (dette exceptionnelle lancée pendant le covid sur cinq ans) qu’il convient de rembourser cette année, il faudra faire des économies que le gouvernement wallon compte trouver en simplifiant le fonctionnement de l’état (réduction de la taille des cabinets et des ministres à double casquette), en réduisant la voilure sur certains projets – le tram a inauguré cette phase – mais surtout en coupant l’indexation et en rationalisant dans certains UAP (Unité d’administration publique), parmi lesquels le Forem et la RTBF. Les questions des parlementaires de la majorité lors de la sous-commission du contrôle de la commission wallonne pour l’énergie (Cwape) ont déjà donné le ton puisqu’ils demandaient à cette dernière quelles pistes d’économie étaient envisageables.
« On va jeter les bases qui vont permettre de tenir la trajectoire budgétaire que l’on s’est fixée », explique François Desquesnes (Les Engagés), ministre de l’Aménagement du territoire, de la Mobilité et des Pouvoirs locaux. « Quand il y a 21 milliards de dépenses contre 18 milliards de recettes, on sait qu’on ne peut pas continuer de la sorte. Ce ne sera pas un budget facile, d’autant plus que c’est le premier et que chacun aura à cœur de défendre ses compétences mais il n’y a pas trop de pierres d’achoppement car pour le moment, on partage la même vision pour redresser la Wallonie. »
Néanmoins, la méthode ne plaît pas à tout le monde. Alors que le gouvernement wallon accélère sur certains dossiers positifs, présents dans la DPR (baisse des droits d’enregistrement, ou celle des droits de succession qui n’interviendront pourtant qu’en 2028), elle prend son temps avant de dévoiler les orientations budgétaires. « Dans les 72 heures après la formation du gouvernement flamand, tous les parlementaires disposaient de douze pages de tableaux budgétaires. On ne demande pas à un gouvernement de dévoiler le premier budget dans la foulée de sa formation mais bien de fournir les tableaux budgétaires, conséquences de l’orientation politique prise », explique Germain Mugemangango, chef de file du PTB au parlement wallon qui parle même de « duperie et malhonnêteté ». Son homologue d’Ecolo, Stéphane Hazée, appuie : « Ma première demande consiste à demander de la transparence. Or, tout sera caché jusqu’aux élections communales. » Mais l’opposition va plus loin, craignant des saignées. « Je voudrais savoir comment ils vont économiser 2,7 milliards sur dix ans. C’est une somme importante. Encore plus si on la met en miroir avec les mesures cadeaux déjà annoncées qu’il faudra également financer. Et je crains aussi l’impact que les mesures régionales pourraient avoir sur les autres niveaux de pouvoir, comme les communes », ajoute Germain Mugemangango. « Les baisses fiscales trop peu ciblées vont inévitablement générer des économies dans d’autres secteurs. Notamment dans les politiques de transition écologique qui risquent d’être affaiblies », conclut Hazée.
Je voudrais savoir comment ils vont économiser 2,7 milliards sur dix ans. C’est une somme importante. Encore plus si on la met en miroir avec les mesures cadeaux déjà annoncées qu’il faudra également financer
Germain Mugemangango, Chef de file du PTB au parlement wallon
Du côté du gouvernement, on estime que rien n’a été caché. « Il n’y aura aucune surprise. On a donné des caps de normes de croissance dans toutes les institutions. La hausse des dépenses sera ralentie. Il ne manque que les détails qu’on discutera en conclave », explique Adrien Dolimont (MR), le Ministre-Président et par ailleurs ministre du Budget. Quant à François Desquesnes qui va devoir trouver des nouvelles pistes de financement pour le plan Oxygène suite au refus d’ING de financer sept villes wallonnes, il ajoute : « On a été très clair depuis le début : tout est dans la DPR. Certes, la précédente législature a connu beaucoup de crises mais seulement la moitié du déficit actuel vient des crises, l’autre moitié vient des politiques nouvelles. Le budget base zéro n’a rien donné, comme le spending review. Donc, oui, on doit réduire les dépenses. Les citoyens veulent-ils qu’on leur mente en affirmant l’inverse ? » Autre inconnue : les projets du Plan de Relance wallon qui résisteront à la purge. Car, le conclave budgétaire examinera également minutieusement le PRW, avec la volonté de mettre fin à certains projets jugés non prioritaires et que l’on pourrait encore arrêter