Une opinion de Jules Gheude (1) sur le site de « La Libre » (https://www.lalibre.be/debats/opinions/2025/03/11/la-wallonie-et-bruxelles-piegees-financierement-par-larizona-PV3M7AIEYZF3DPUW7WIMTXCEGE/

Inutile de rappeler ici le gouffre budgétaire abyssal dans lequel les Régions wallonne et bruxelloise sont plongées. En ce qui concerne cette dernière, la situation est d’autant plus critique qu’elle n’est toujours pas parvenue, depuis les élections du 9 juin dernier, à se doter d’un exécutif.
Et ceci est sans compter avec l’impact négatif que certaines mesures de la coalition fédérale Arizona ne manqueront pas d’avoir sur les finances wallonnes et bruxelloises.
Selon le ministre-président wallon, Adrien Dolimont, cet impact sera de 270 millions par an, engendré principalement par la baisse de l’impôt des personnes physiques et la limitation du chômage dans le temps.
270 millions, soit 5 millions de plus que l’effort de réduction du déficit que le gouvernement wallon s’est engagé de faire en 2025.
Pour la Région bruxelloise, le tableau est également fort sombre.
Dans une note adressée à l’attention de la Conférence des bourgmestres de Bruxelles, les experts de Brulocalis (ex-Association des villes et communes de la Région bruxelloise) expliquent que l’impact des réformes du chômage, de l’impôt des personnes physiques, des pensions et des zones de police pourrait s’élever à 1,65 milliard d’euros à l’horizon 2029.
Une question se pose ici. Les négociateurs francophones de l’Arizona, Georges-Louis Bouchez et Maxime Prévot, avaient-ils chiffré cet impact négatif pour la Wallonie et Bruxelles ? Ou celui-ci n’a-t-il été calculé qu’après coup ?
Car bien que les négociations aient duré plus de huit mois, il apparaît qu’une certaine improvisation n’a pu être évitée.
Les débats sur la déclaration de politique générale ont ainsi révélé un trou de 210 millions d’euros dans le budget 2025, lié à la non-rétroactivité de la fin de l’avantage fiscal pour les résidences secondaires.
Ce ne serait en tout cas pas la première fois que, pour amener fin alement les responsables francophones à accepter un accroissement de la réforme de l’Etat, la Flandre jouerait la carte de l’argent.
Souvenons-nous des « Toshiba-boys » de l’ancien Premier ministre CVP Jean-Luc Dehaene, qui, disposant d’un matériel infomratique très performant, s’étaient arrangés pour que l’enseignement francophone fût rapidement asphyxié. C’est ainsi que les responsables francophones se virent contraints, en 2001, de faire de nouvelles concessions en échange d’un refinancement pour leurs écoles.
Aujourd’hui, Bart De Wever, se retrouve à la tête du gouvernement belge sans pouvoir, faute de majorité des deux-tiers, réaliser la réforme confédérale à laquelle il aspire. Mais comme l’a déclaré son frère Bruno : « Quand on occupe le 16, rue de la Loi, il existe, derrière les tentures, bien des moyens pour faire éclater un peu plus la Belgique. »
En fait, pour faire aboutir sa thèse, l’ex-leader des nationalistes flamands a tout intérêt à ce que l’écart entre la Flandre et la Wallonie subsiste et que l’imbroglio bruxellois se poursuive. Il pourrait ainsi démontrer le bien-fondé du projet confédéral : un pouvoir central réduit à sa plus simple expression (trois ou quatre compétences) et deux Etats – Flandre et Wallonie – cogérant Bruxelles au niveau des matières personnalisables (impôt des personnes, soins de santé, etc.).
Un projet confédéral qui serait en fait l’antichambre du séparatisme. Car il ne faudrait pas longtemps à la Flandre pour considérer que l’échelon central est devenu totalement superflu.
Le fameux documentaire « Bye bye Belgium » de la RTBF passerait ainsi de la fiction à la réalité.
- Dans son deuxième roman, « Le Suicidé de Porquerolles », paru dernièrement aux Presses du Midi à Toulon, Jules Gheude évoque notamment le démantèlement de la Belgique et la perspective d’une intégration de la Wallonie à la Flandre.